Le football inclusif : de la théorie à la pratique en passant par Kraainem
L’étudiante découvre que le sport « adapté » dépasse largement le cadre du handisport. C’est une façon d’encadrer des pratiques sportives de façon inclusive, en toutes circonstances et pour tous les publics, notamment les personnes migrantes qui rencontrent des challenges spécifiques.
Rien d’étonnant à ce que Valentine atterrisse alors au club de Kraainem pour observer et s’inspirer du projet « We Welcome Young Refugees ». Chaque mardi et vendredi, elle se rend aux tables de conversation qui rassemblent des jeunes venus du Centre Fedasil de Woluwé-Saint-Pierre autour des bénévoles Myriam, Alban et Jean-François. Valentine adore ces moments où elle peut partager sa culture, découvrir de nouveaux mots, glaner des recettes et collectionner les anecdotes joyeuses.
Après cette heure d’échange, Valentine accompagne les MENA (mineurs étrangers non accompagnés) sur le terrain. Ils rejoignent un entraînement et Valentine veille à les aider à mieux comprendre et réaliser les exercices proposés par les coachs.
Faire tomber les barrières sur le terrain
Ses observations sont précieuses. Elle constate par exemple que le temps d’une présentation en bonne et due forme n’est pas toujours pris. Si c’est le cas, les noms de joueurs (d’origines afghane, érythréenne, irakienne, …) ne sont pas aisément retenus par les affiliés du club qui finissent par les appeler « les réfugiés ». Vu que des coéquipiers doivent souvent s’interpeller sur un terrain, cela crée des barrières et une difficulté à aller vers l’autre. Valentine suggère au coach de favoriser des exercices mixtes, pour faciliter des prises de contact plus personnelles.
Parmi les réfugiés, le rapport au foot varie beaucoup. Certains n’y ont jamais vraiment joué (les Afghans, par exemple, sont plus familiers du cricket). D’autres sont probablement plus habitués à pratiquer le foot en rue que sur un terrain : « Je le devine parce qu’ils sont vite hors-jeu, ou alors ils évoluent au milieu et courent partout, ce qui les fatigue trop », précise Valentine. Elle se souvient par contre de deux ivoiriens et de quelques personnalités qui « savaient très bien se placer, dribbler, faire une passe ».
Gérer les différences culturelles et linguistiques nécessite de la flexibilité et de la patience sur le terrain. Il faut pouvoir expliquer les choses par beaucoup de gestes, parfois répétés. Certains coachs prennent ce temps spontanément, d’autres y pensent moins, surtout le vendredi, quand le match dominical entre en ligne de mire.
Un match auquel les joueurs réfugiés venant de Fedasil Woluwé-Saint-Pierre ne peuvent malheureusement pas participer. En effet, les résidents de ce centre n’y restent que quelques semaines après leur arrivée en Belgique. Ils sont ensuite envoyés vers d’autres lieux d’accueil, parfois dans d’autres provinces.
Rêver grand !
Valentine rêve d’un réseau sportif élargi qui pourrait prendre le relais partout ailleurs. Lorsqu’ils changeraient de centres, les candidats réfugiés trouveraient facilement d’autres espaces où pratiquer du sport. Pas que dans des clubs de foot mais aussi des salles de danse, d’escalade, des espaces de pétanque et de tir à l’arc. « Pourquoi pas ? », s’enthousiasme Valentine. Dans sa région d’origine, Annecy, des montagnards organisent même des journées d’initiation au ski pour les réfugiés.
Valentine est aujourd’hui diplômée et travaille dans l’association Gym SANA qui organise des activités physiques pour un public varié (des personnes âgées, en situation de handicap mental ou fragilisées par une maladie chronique). Toujours aussi passionnée de foot, elle rêve de coacher une équipe de femmes réfugiées pour les accompagner jusqu’aux Jeux Olympiques.